Après les cascades de Rog, nous partons pour les cascades de Skradin, situées à quelques kilomètres seulement. Ici il faut se garer sur un parking et marcher une petite demi-heure sur un chemin rocailleux pour rejoindre un ancien petit village et le départ du sentier sur passerelles qui serpente au-dessus de la rivière Krka. L’endroit n’est pas sans rappeler Plitvice mais l’ambiance est différente, notamment parce que l’on serpente ici dans une végétation plus arborée, entre d’anciennes habitations, et parce qu’ici aussi l’eau est absolument déchainée et se déverse partout en furie dans des lacs plus profonds.
C’est finalement très agréable de marcher sur ces longues passerelles en bois, immobiles et paisibles malgré le déferlement de l’eau. Ce n’est pas souvent que l’on a l’occasion de se balader au-dessus d’une marmite en ébullition.
Le vieux moulin et certain autres bâtiments anciens sont ouverts gratuitement à la visite. Ils permettent de se représenter la vie des anciens habitants du village, la fabrication de la farine, du pain, le lavage de la laine et le tissage de l’osier. Le lavoir sera même utilisé jusque dans les années 70 par les habitants du coin.
Ici, ce sont des bâtons de comptage (raboš). Le bâton servait de pense-bête à son propriétaire, par exemple pour lui rappeler combien il possède de blé, d’huile, combien il a prêté d’argent etc. S’il servait également pour deux personnes à la fois (dans un rapport créditeur / débiteur), les obligations de chacun y étaient entaillées. Le bâton de comptage était pour cela fendu sur toute sa longueur jusqu’à la poignée, puis les deux moitiés juxtaposées, une entaille au couteau y était faite de manière à rester visible sur les deux moitiés du bâton. Les deux parties effectuant la transaction conservait chacune une moitié de bâton. Les bâtons de comptage ont été utilisés en Europe du Moyen Age jusqu’au XIX siècle, et même dans certaines régions jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ils étaient utilisés par les meuniers, les aubergistes, les boulangers et les bouchers lorsqu’ils vendaient leur marchandise à crédit. Ils étaient aussi utilisés par les bergers pour tenir le compte de leurs moutons, fromages et laine.
Nous continuons à arpenter les passerelles qui suivent le cours de la rivière. À de rares endroits, lorsque l’eau se calme, on peut admirer à quel point elle est cristalline. Par endroit le sentier est immergé, Jules (j’ai déjà précisé qu’il aime bien avoir les pieds dans l’eau) se hisse sur les rambardes pour apercevoir plus loin les grandes chutes d’eau.
Car en aval du petit village, l’eau de la rivière se déverse dans une série de cascades impressionnantes. Il est possible de les admirer d’assez près grâce, encore une fois, à une passerelle qui traverse un grand lac. Même si on est loin de l’image de la brochure, on trouve le spectacle magnifique et impressionnant. Malgré la distance entre la passerelle et les chutes d’eau on est mouillés par les embruns. Dire qu’en été, il est possible de se baigner à cet endroit… difficile à imaginer. De l’autre côté, l’eau calme enfin sa course folle pour redevenir une étendue paisible aux reflets émeraude.
On n’est pas les plus doués pour les selfies…
… mais au bout de 13 ans, on a enfin quelques photos de nous !
Le retour se fait en remontant à nouveau par l’ancien petit village, qui tel le Titanic, prend l’eau de toute part ! On sympathise avec quelques chats. Il y en a même un qui va faire avec nous la remonté de 30 minutes sur le sentier caillouteux jusqu’au parking. Je résiste comme je peux à en embarquer un ou deux avec nous dans le camion, notamment parce que Jules me fait de gros yeux !